• ACCUEIL
  • LE LIVRE
  • L'AUTEUR
  • ILS EN PARLENT
  • REVUE DE PRESSE
BARRANCA
  • ACCUEIL
  • LE LIVRE
  • L'AUTEUR
  • ILS EN PARLENT
  • REVUE DE PRESSE

BARRANCA / CHAPITRE 5 / PARTIE 1

7/28/2017

0 Commentaires

 
BIENVENUE DANS CETTE AVENTURE DÉJANTÉE. Chaque vendredi retrouvez ici BARRANCA en lecture libre. 

​Résumé : Leurs examens réussis, à la suite d'un pari de jeunesse insensé, Victor et Romane se sont donné rendez-vous dans une petite ville inconnue, du sud des Etats Unis, Santa Clara. Victor trouve à se loger dans la pension glauque de Mamma Gloria. Romane arrive à son tour.


Le temps s'était franchement dégradé. 
Les radios confirmaient que la dépression prévue pour la nuit prochaine s'était transformée en une violente tempête de classe quatre. Le mercure était descendu à neuf cent soixante-dix millibars. Aucune chance qu'elle passe à côté. On allait y avoir droit d’ici quelques jours. Les bourrasques entraînaient déjà des hordes de papiers qui volaient en tous sens et finissaient perchés sur les poteaux électriques. Il valait mieux se planquer.
Le soir tombait. Plus un seul bus n'était en service. Malgré le danger, avec Romane, on était remonté à pied depuis la gare routière. Les dernières automobiles, les camions, les fourgonnettes, les motos, même les vélos quittaient la région. La ville s’était vidée comme un siphon.   
À mesure que nous remontions vers la rue N, la verdure se faisait plus rare, les voitures plus abîmées, les rues plus étroites, les escaliers en fer plus rouillés. Les poubelles défoncées rendaient chaque coin de rue plus lugubre. Nous entrions dans la couleur rouge brique des quartiers pauvres. Ça donnait l'impression de dégringoler dans la cave de la ville. Le temps pourri n’arrangeait rien. Le ciel était devenu plus menaçant que jamais. La pluie pénétrante avait détrempé les revêtements et rendait les façades encore plus sinistres. Romane et moi, nous terminions en courant les cent cinquante mètres qui nous séparaient de notre piaule en évitant les flaques d'eau. En quelques secondes nous dégoulinions de toutes parts. On avait mis des sacs plastiques sur nos têtes mais les bourrasques faisaient voler nos capuches de fortune. Pas de lumière sur la façade. Le vélo sans roues, accroché à son antivol ballottait au vent dans un concert de « clang clang ». Les occupants de l’immeuble avaient tous déserté. La porte d'entrée claquait et la pluie s'était répandue jusqu'au milieu du couloir.
- On dirait que le Japon a détalé ! Fis-je.
On avançait sur la pointe des pieds, enjambant les plus grandes flaques. Mamma Gloria avait disparu aussi. J’imaginais qu’elle avait rejoint la horde des prétendants au départ dans la salle d’attente de la gare routière. 
- Tu as vu ta tête ? C'est pas avec un brushing pareil que tu seras élue !
Romane se contenta d’un sourire. 
- T'as vu la tienne ! C'est vrai qu'elle est plus compatible avec l'idée qu'on se fait généralement d'un globe trotter... 
Elle regarda en arrière le ciel menaçant avant d’ouvrir la porte. 
Je n'avais jamais cru aux forces divines ni aux signaux surnaturels. Je haïssais l'idée même qu'un homme puisse ne pas être maître de son destin. Mais là je dois dire que le ciel m'en mettait plein la gueule.
- Super, en tout cas, le plan du globe terrestre de la classe de quatrième ! 
Dit-elle en franchissant le seuil de notre refuge.

Depuis quelques jours, le vent avait encore forci. Les bourrasques ballottaient dangereusement les enseignes. L'avenue Alameda était jonchée de flaques d'eau. Toutes sirènes hurlantes les voitures de la sécurité civile annonçaient par haut-parleur l'arrivée imminente de la dépression. La voie enregistrée du Maire priait les passants, pour leur sécurité, de se rendre dans un des abris mis à leur disposition par la municipalité. 
- C'est pour ce soir le grand déferlement, on dirait, Victor. 
- Oui, la tempête sera sur nous, d'ici quelques heures... 
- Drôle de temps pour un anniversaire ! 
- Pourquoi dis-tu ça, Romane ?
- Parce que c'est le tien, Victor, c'est ton anniversaire aujourd'hui, tu ne t'en souviens jamais ! Ça te fait dix-neuf, non ?
- Anniversaire ! C'est vrai, j'avais complétement oublié ! Dix-neuf ? Oui, dix-neuf !
- Il va falloir fêter ça, de toute façon… Comme tu voudras… 
- Nous sommes à deux pas de la frontière du Sud, Romane... On n'en a jamais été aussi proche... C'est le moment ou jamais... La Mer de Cortez, tu te souviens ? 
- Ne recommence pas avec ça... On est aussi à côté de Cuba si tu vas par là... On était là pour quelques jours, on l'avait dit, et toi tu reviens à la charge... C'est la fuite en avant, Victor... Vacherie de flotte, on est trempés, tu as bien choisi ton bled ! J’ai un billet retour en avion et je ne sais même pas si les avions décolleront…  
 - Tu veux retourner dans cette foire ? Changer le système de l'intérieur, comme tu dis… Les partis et les syndicats, ça fait des années qu'ils nous serinent le même discours, Romane... Sais-tu ce qui s'est passé le vingt-huit février ?
- Le vingt-huit février ?
- Le vingt-huit février mille neuf cent soixante-neuf. 
- C'est un mouvement politique ?
- Non, c'est le jour où un navigateur solitaire a décidé de renoncer à la course autour du monde qu'il menait pourtant en tête. Alors qu’il était sur le point de franchir la ligne d’arrivée, il préféra ne pas empocher la forte prime promise au vainqueur. C’est un acte incroyable, une date historique ! 
- Et pourquoi il a fait ça, ce type ? 
- Ce mec était parti, un an plus tôt de Plymouth, en Angleterre, à bord d'un bateau construit selon ses propres plans. Il avait bouclé les trois quarts de la course, lorsqu'il a compris cette chose essentielle : Il était plus dangereux de regagner son port d’origine et de retrouver la civilisation que de continuer, même si pour cela il devait repasser par le cap de Bonne-Espérance et risquer sa vie dans les quarantièmes rugissants… Ce type s’appelait Bernard Moitessier, j’ai son bouquin, là.
- Et dans quel but tout ça ?
- Pour rester lui-même ! Pour ne pas se compromettre. Il avait compris le danger pour l'âme que représentait la civilisation moderne. Il avait compris cela parce qu'il s'en était extrait. Observer de l’extérieur, c'est ça la condition pour le véritable changement. C'est ce geste, ce renoncement, malgré l'appât de la victoire. Il y a des choses que l'on ne peut pas comprendre si l'on est à l'intérieur.
- Tu parles, Victor, tu parles toujours... Ça fait quelques années, que tu gloses sur le thème de l'obsolescence de la classe politique. Je connais ton discours par cœur. Laisse-moi rigoler... Tu vises quoi, toi ?
- Romane, tu regrettes tes quarante mètres carrés à la tour du Vieux Pont ? 
- Ici on a combien de mètres carrés, dix, douze ?
- On a fait le plus dur... Le plus difficile était de partir !
- Pour faire quoi ? Pour aller où ?
- J'ai une idée, Une idée de fou ! Grosse comme un immeuble ! Je ne t'en ai pas parlé encore...

(À SUIVRE)
0 Commentaires



Laisser un réponse.

    ​Livre papier, 
    format 12,5 x 20 cm, 418 pages,
    couverture souple, vernis mat.

    Prix TTC : 19,50€ 
    Livraison gratuite par Lettre 
    suivie
    (France métropolitaine).

    CHAQUE VENDREDI, RETROUVEZ ICI 
    LE ROMAN COMPLET
    ​EN LECTURE LIBRE

    les CHAPITRES PRÉCÉDENTS

    Janvier 2018
    Décembre 2017
    Novembre 2017
    Octobre 2017
    Septembre 2017
    Août 2017
    Juillet 2017
    Juin 2017
    Mai 2017

    Flux RSS

Powered by Create your own unique website with customizable templates.
  • ACCUEIL
  • LE LIVRE
  • L'AUTEUR
  • ILS EN PARLENT
  • REVUE DE PRESSE